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31 janvier 2007 3 31 /01 /janvier /2007 1126 2 fĂ©vrier Voici une serie de sites qui vous permettra d'occuper vos enfants pour cette occasion. En musique de fond, vous entendez une chanson de GĂ©rard Delahaye originaire de Morlaix comme moi voir aussi son blog qui s'intitule " Farine de froment, Farine de blĂ©-noir " et en prime, les paroles de la chanson que vous Ă©coutez si vous avez branchĂ© le son Farine de froment farine de blĂ© noir Trois bigoudĂšnes sont parties prendre le car Farine de froment farine de blĂ© noir trois bigoudĂšnes sont parties prendre le car elles vont Ă New York faire des crĂȘpes et du far Gare de Quimper, kenavo au revoir farine de froment, farine de blĂ© noir Gare de Quimper, kenavo au revoir Essuyez vos larmes agitez les mouchoirs Il est midi, il fait encore tout noir farine de froment farine de blĂ© noir Il est midi, il fait encore tout noir dĂ©calage horaire le soleil est en retard C'est haut, c'est haut, ma douĂ©, que c'est haut tous ces grattes ciel comme des sapins de noel hello good morning monsieur l'agent where is the crĂȘperie of madam' Kerjean? You're lucky, jy suis allĂ© hier soir farine de froment farine de blĂ© noir You're lucky, jy suis allĂ© hier soir SoixantiĂšme Ă©tage au fond du couloir bats la pĂąte Ă crĂȘpe et bats la pĂąte Ă far Farine de froment farine de blĂ© noir bats la pĂąte Ă crĂȘpe et bats la pĂąte Ă far faut travailler dur si tu veux des dollars bis C'est bon, c'est bon, ma douĂ©, que c'est bon finis les hamburgers on veut des crĂȘpes au beurre! tout New York fait la queue sur le trottoir Les trois bigoudĂšnes sont devenues des stars Trois bigoudĂšnes sont revenues en fanfare farine de froment farine de blĂ© noir Trois bigoudĂšnes sont revenues en fanfare chacune Ă son bras un mari tout noir bis Si vous voulez la fortune et la gloire Farine de froment farine de blĂ© noir Si vous voulez la fortune et la gloire J'vous dirai comment faire des crĂȘpes et du far! bis GĂ©rard Delahaye Published by Pascaly - dans FĂȘtes
pasun grain de blĂ© ; pas la moindre farine aux murs ni sur les. toiles dâaraignĂ©e On ne sentait pas mĂȘme cette bonne odeur . chaude de froment Ă©crasĂ© qui embaume dans les moulins Lâarbre. de couche* Ă©tait couvert de poussiĂšre, et le grand chat maigre. dormait dessus. La piĂšce du bas avait le mĂȘme air de misĂšre et dâabandon : â un. mauvais lit, quelques guenilles, un
Forum / PrÚs de chez vous Bonjour à tous,Dans le cadre de mon travail, je suis à la recherche de chansons parlant de la Bretagne et/ou du FinistÚre. Egalement des chansons un peu rigolote telle que "Farine de Froment; farine de blé noir" de d'avanceAlly Votre navigateur ne peut pas afficher ce tag vidéo. Bonjour,comme deja dit, l'autre de miossec , la chanson BrestEn chanson populaire, bien sur, Vive la Bretagne, vive les BretonsPour le moment, je n en vois pas d autres. J'aime Chansonstu cherche sur la Bretagne en général ou des villes aussi ????A BientÎt J'aime 3 bigoudennesj'allais justement te parler des 3 bigoudennes sont allez prendre le cars...Tu connais les ours du scorff ? c'est du traditionnelle breton pour enfants ça ne parle pas directement de la bretagne mais c'est sympasTout l'album de delahaye est génial J'aime Vous ne trouvez pas votre réponse ? Titrevoici plusieurs titres - Le pont de Morlaix- La Blanche Hermine Gilles Servat- Les prisons de Nantes Tri Yann- Pelot d'hennebont Tri YannSi je pense a autre chose je te dirais J'aime Reponsej'ai lu ton messageje suis chanteuret j'ai pas mal de chansons sur la bretagneet notamment une chanson sur quimpertgahinet J'aime
Epicerie conserves, quelques lĂ©gumes, du sorgho, du mil, du riz, de la farine de froment et puis des guides, des taxis, des auberges Bienvenue Ă Atar. LâaĂ©roport est tout neuf, tout blanc. Câest lĂ quâatterrissent deux fois par semaine les charters affrĂ©tĂ©s par Point Afrique. Les 4/4 et les taxis y attendent les voyageurs. Premier contact avec la Mauritanie (ou MaurĂ©tanie
VEILLĂESDE LâUKRAINE CHAPITRE PREMIER Quel dĂ©lire ! quelle splendeur quâun jour dâĂ©tĂ© dans la Petite-Russie ! De quelle chaleur languissante sont chargĂ©es les heures quand midi Ă©clate silencieux et brĂ»lant, et que lâOcĂ©an bleu, infini, Ă©tendu en voĂ»te ardente sur la terre, semble dormir tout noyĂ© de voluptĂ© en enlaçant et en Ă©treignant la bien-aimĂ©e dans ses bras Ă©thĂ©rĂ©s. Pas un nuage au ciel ; dans les champs, pas une parole. Tout semble mort. En haut, seulement, dans la profondeur du ciel, frĂ©mit lâalouette ; et sa chanson dâargent roule sur les marches aĂ©riennes jusquâĂ la terre amoureuse. Par instant, le cri de la mouette ou la voix sonore de la caille, rĂ©sonne dans la steppe. Paresseux et sans pensĂ©e, comme vaguant sans but, sâĂ©lĂšvent les chĂȘnes ombrageux. Et le jet aveuglant des rayons solaires embrase pittoresquement des masses entiĂšres de feuillages en enveloppant les autres dâune ombre noire comme la nuit, sur laquelle un vent violent fait çà et lĂ scintiller de lâor. LâĂ©meraude, la topaze, le saphir des insectes aĂ©riens, ruissellent sur les jardins bigarrĂ©s ombragĂ©s de tournesols Ă©lancĂ©s. Les meules grises du foin et les gerbes dorĂ©es du blĂ©, sâĂ©tagent en camps dans la plaine et se dĂ©roulent Ă lâinfini. Les larges branches des cerisiers, des pruniers, des pommiers et des poiriers, plient sous le poids des fruits. Le ciel se reflĂšte dans la riviĂšre comme dans un miroir au cadre vert et Ă©levé⊠De quelle voluptĂ© et de quelle langueur dĂ©borde lâĂ©tĂ© de la Petite-Russie ! Câest de cette splendeur que brillait une des chaudes journĂ©es du mois dâaoĂ»t dix-huit cent⊠dix-huit cent⊠oui, il y a une trentaine dâannĂ©es, lorsque, sur une longueur de plus de dix verstes, la route conduisant au village de Sorotchinetz grouillait de la foule accourue Ă la foire de tous les environs et des hameaux les plus lointains. DĂšs le matin, sâallongeait la foule ininterrompue de Tchoumaks[1], avec leurs voitures de sel et de poisson. Des montagnes de poteries enterrĂ©es sous le foin se mouvaient lentement, comme ennuyĂ©es de leur obscure prison. ĂĂ et lĂ , seulement quelques terrines ou soupiĂšres aux couleurs Ă©clatantes se montraient vaniteusement au sommet de la charrette surchargĂ©e et provoquaient les regards attendris des adorateurs du confort. De nombreux passants contemplaient dâun Ćil dâenvie le potier de haute taille, propriĂ©taire de ces richesses, lequel, dâun pas lent, marchait derriĂšre ses marchandises, enveloppant soigneusement le dandysme et la coquetterie de ses vases dans lâhumble foin. Loin des autres, se traĂźnait une charrette tirĂ©e par des bĆufs fatiguĂ©s, et remplie de sacs de chanvre, de toile et de divers objets de mĂ©nage. DerriĂšre venait le propriĂ©taire vĂȘtu dâune chemise de toile bien blanche et dâune culotte de toile sale. Dâune main paresseuse, il essuyait la sueur qui coulait en pluie de son visage basanĂ© et dĂ©gouttait de ses longues moustaches poudrĂ©es par ce perruquier impitoyable qui vient sans quâon lâappelle, sâemparant Ă©galement des plus belles et des plus laides, et poudrant par force, depuis des milliers dâannĂ©es, toute lâespĂšce humaine. Ă ses cĂŽtĂ©s, marchait attachĂ©e Ă la charrette une jument dont lâaspect timide trahissait un Ăąge plus quâavancĂ©. Beaucoup et surtout les jeunes gens portaient la main Ă leur bonnet en croisant le moujik. Ce nâĂ©taient cependant ni sa moustache grise ni sa dĂ©marche imposante qui lui valaient ces saluts. Il suffisait de lever la tĂȘte pour en dĂ©couvrir la cause. Sur la charrette, Ă©tait assise son enfant, une jolie fille au visage arrondi, aux sourcils noirs et bien arquĂ©s surmontant des yeux brun-clair, aux lĂšvres roses et souriantes, la tĂȘte ornĂ©e de rubans rouges et bleus qui, avec ses longues nattes, un bouquet de fleurs des champs et une riche couronne, formaient le plus ravissant tableau. Tout semblait lâintĂ©resser ; tout lui Ă©tait Ă©trange et neuf⊠et ses beaux yeux allaient sans cesse dâun objet Ă lâautre. Comment ne pas se distraire ! Ă la foire pour la premiĂšre fois ! Une jeune fille de dix-huit ans et Ă la foire pour la premiĂšre fois ! Mais aucun des passants ne pouvait se douter du mal quâelle avait eu Ă persuader son pĂšre de la prendre avec lui, non pas que, personnellement, il ne lâeĂ»t fait volontiers, mais il avait Ă compter avec la mĂ©chante marĂątre qui avait su le brider et le conduisait aussi facilement quâil conduisait lui-mĂȘme la vieille jument quâon allait vendre aujourdâhui pour prix de ses longs services. La criarde Ă©pouse⊠mais nous avons oubliĂ© quâelle est assise, elle aussi, au haut de la charrette, dans une superbe camisole de laine verte, piquĂ©e, comme la fourrure de la martre, de petites queues, mais rouges ; avec une riche jupe bigarrĂ©e comme un Ă©chiquier et un bonnet dâindienne de couleur, qui donnait un certain air dâimportance Ă son visage rouge et plein dâaspect si rĂ©barbatif que chacun se hĂątait de reporter son regard inquiet sur le gai visage de la jeune fille. Aux yeux de nos voyageurs, Psiol[2] commençait Ă poindre. De loin venait une fraĂźcheur dâautant plus sensible que la chaleur avait Ă©tĂ© plus lourde et plus accablante. Ă travers le feuillage vert-clair des peupliers et des bouleaux, nĂ©gligemment semĂ©s dans la prairie, apparaissaient des plaques de lumiĂšre froide ; et la belle riviĂšre dĂ©couvrit la splendeur de sa poitrine dâargent sur laquelle se rĂ©pandait richement la verte chevelure des arbres. Fantasque comme une jolie femme, Ă lâheure enivrante oĂč, devant le miroir jaloux de son front altier, de ses Ă©paules rosĂ©es et de sa gorge de marbre, ombragĂ©e par une boucle sombre tombĂ©e de sa tĂȘte blonde, elle jette avec mĂ©pris ses parures pour les remplacer par dâautres et ne connaĂźt pas de fin Ă ses caprices, ses eaux presque chaque annĂ©e changent leurs cours, choisissent une nouvelle voie et sâentourent de paysages nouveaux et divers. Les rangĂ©es de moulins soulevaient sur leurs lourdes roues de larges nappes quâelles rejetaient avec force en les brisant en pluie et en emplissant les environs de poussiĂšre humide et de bruit. La charrette, avec les voyageurs que nous connaissons, roulait en ce moment vers le pont, et, la riviĂšre, dans toute sa majestueuse beautĂ©, sâĂ©tendait devant eux comme une seule glace. Le ciel, les forĂȘts vertes et bleues, les hommes, les voitures chargĂ©es de poteries, les moulins, tout se renverse, surgit et marche les pieds en lâair sans tomber dans la splendide profondeur bleue. Notre belle devint songeuse Ă ce magnifique spectacle et oublia mĂȘme de faire craquer sous sa dent les graines de tournesol quâelle Ă©tait occupĂ©e Ă grignoter depuis le dĂ©part, lorsque tout Ă coup, les mots Ah ! la jolie fille ! » frappĂšrent ses oreilles. Elle tourna la tĂȘte et aperçut sur le pont une foule de jeunes gens dont lâun, mieux vĂȘtu que les autres, en svitka[3] blanche et en bonnet gris dâAstrakan, les mains sur les hanches, regardait hardiment les passants. La belle ne put faire autrement que de remarquer son visage basanĂ© mais respirant la sympathie et ses regards brĂ»lants qui semblaient vouloir la transpercer. Elle baissa les yeux Ă la pensĂ©e que, peut-ĂȘtre, lâexclamation entondue lui appartenait. â Une riche fille ! continua le jeune homme Ă la svitka blanche, sans la quitter de lâĆil. Je donnerais bien tout ce que je possĂšde pour lâembrasser, mais câest le diable qui est aussi derriĂšre elle. Des rires Ă©clatĂšrent de tous cĂŽtĂ©s. Mais la compagne chamarrĂ©e de lâĂ©poux qui sâavançait Ă pas lents, ne goĂ»ta pas le compliment. Ses joues rouges sâempourprĂšrent et un crĂ©pitement dâĂ©pithĂštes choisies roula en averse sur la tĂȘte des joyeux gars. â Puisses-tu Ă©touffer, propre Ă rien ! Puisse un vase tomber sur la tĂȘte de ton pĂšre ! Quâil se rompe le cou sur la glace, lâantichrist maudit ! Et que, dans lâautre monde, le diable lui roussisse la barbe ! â Voyez-vous lâinsulteuse ! fit le jeune homme en Ă©carquillant les yeux, comme stupĂ©fait dâune pareille explosion de compliments inattendus. Comment la langue de cette sorciĂšre hors dâĂąge ne se blesse-t-elle pas Ă articuler de semblables mots ! â Hors dâĂąge[4] ! saisit au vol la mĂ»re personne. Lâimpudent ! Va donc dâabord te dĂ©barbouiller, moricaud. Je nâai pas connu ta mĂšre, mais je suis certaine que câest une pas grandâchose ; ton pĂšre aussi est un pas grandâchose. Hors dâĂąge ! parce quâil a encore du lait au bec ! La charrette, en ce moment, sortait du pont, et les derniĂšres paroles se perdirent dans lâair. Mais le jeune homme ne voulut pas en rester lĂ . Sans plus rĂ©flĂ©chir, il saisit une motte de boue et la lança⊠Le coup Ă©tait mieux dirigĂ© quâon ne pouvait le supposer tout le bonnet neuf dâindienne se trouva couvert de boue ; et les rires des joyeux compagnons de reprendre avec une force nouvelle. LâobĂšse coquette frĂ©mit de colĂšre ; mais la charrette Ă©tait alors assez loin et elle tourna sa vengeance contre sa belle-fille innocente et son lent Ă©poux, lequel, habituĂ© de longue date Ă des incidents de ce genre, gardait un silence obstinĂ© et Ă©coutait avec le plus grand sang-froid la sortie emportĂ©e de son Ă©pouse en fureur. MalgrĂ© cela, la langue infatigable crĂ©pitait et ne sâarrĂȘta quâĂ leur entrĂ©e dans le faubourg, lorsquâils arrivĂšrent chez leur vieil ami et compĂšre le cosaque Tsyboulia. Cette entrevue entre compĂšres qui ne sâĂ©taient pas rencontrĂ©s depuis longtemps, fit oublier momentanĂ©ment le fĂącheux Ă©vĂ©nement en forçant nos voyageurs Ă sâentretenir de la foire et Ă reposer quelque peu aprĂšs une longue route. CHAPITRE II Peut-ĂȘtre vous est-il arrivĂ© dâentendre une cataracte lointaine quand les environs troublĂ©s sont pleins de fracas et quâun chaos de rumeurs Ă©tranges et indistinctes passe devant vous comme un tourbillon. Nâest-ce pas une sensation analogue que lâon Ă©prouve, lorsque lâon est pris dans le tourbillon dâune foire au village et que les rangs serrĂ©s de la foule ne forment plus quâun monstre sinueux qui se meut de tout son corps sur la place et dans les rues Ă©troites, criant, sâinterpellant et grondant. Vacarme, jurons, mugissements, bĂȘlements, rugissements, tout se fond en un brouhaha discordant. Les bĆufs, le son, le foin, les tziganes, les poteries, les babas[5], les pains dâĂ©pices, les bonnets, tout flamboie bigarrĂ© et criard, sâagite en groupe et dĂ©file devant vos yeux. Des voix de diffĂ©rents timbres se couvrent lâune lâautre, et pas une parole ne peut ĂȘtre saisie, sauvĂ©e de ce dĂ©luge. Pas un cri ne sâarticule distinctement ; on nâentend dans toute la foire que des mains de marchands frappant lâune dans lâautre, Ă lâappui du marchĂ© conclu. Une charrette se brise, le fer rĂ©sonne ; des planches jetĂ©es Ă terre retentissent et la tĂȘte qui nous tourne ne sait oĂč sâarrĂȘter. Notre moujik avec sa fille aux noirs sourcils sâĂ©tait depuis longtemps mĂȘlĂ© Ă la foule. Il sâapprochait dâune charrette, hĂ©lait lâautre, comparait les prix, et cependant, sa pensĂ©e tournait toujours autour des dix sacs de blĂ© et de la vieille jument quâil avait amenĂ©s pour la vente. On pouvait voir Ă lâexpression du visage de sa fille quâil nâĂ©tait rien moins quâagrĂ©able Ă celle-ci de se frotter aux charrettes de foin ou de blĂ©. Elle aurait voulu aller lĂ oĂč, sous la toile des tentes, sont coquettement appendus des rubans rouges, des boucles dâoreilles, des croix dâĂ©tain et de cuivre et des piĂšces dâor pour colliers. Cependant le spectacle quâelle avait devant les yeux ne manquait pas dâintĂ©rĂȘt. Elle prenait un intime plaisir Ă regarder ici un tzigane bigarrĂ© et un moujik se frapper dans la main jusquâĂ crier de douleur ; lĂ un juif ivre offrir du kissel[6] Ă une baba ; plus loin, des poissardes sâinjurier et se jeter des Ă©crevisses Ă la tĂȘte ; ailleurs encore, un Moscovite caresser dâune main sa barbe de bouc et de lâautre⊠mais voilĂ quâelle se sent tirer par la manche brodĂ©e de sa chemise. Elle se retourne et se trouve en face du parobok Ă la svitka blanche et aux yeux ardents. Tout son corps tressaillit, son cĆur se mit Ă battre comme jamais il nâavait encore battu, ni sous la joie, ni sous la douleur, sensation Ă©trange et dĂ©licieuse en mĂȘme temps ; elle ne pouvait se rendre compte de ce quâelle prouvait. â Nâaie pas peur, mon petit cĆur ! nâaie pas peur, fit-il Ă demi-voix en lui prenant la main. Je ne te dirai rien de mal ! Il se peut que tu ne me dises rien de mal, pensa la jeune fille, seulement, câest Ă©trange. Ce doit ĂȘtre le diable. Je sais que sĂ»rement ce nâest pas bien⊠et cependant je nâai pas la force de lui reprendre ma main. » Le moujik se retourna, voulant dire quelque chose Ă sa fille, mais le mot blĂ© » retentit alors Ă ses cĂŽtĂ©s. Ce mot magique le fit immĂ©diatement sâapprocher de deux nĂ©gociants qui parlaient haut, et, son attention fixĂ©e sur eux, rien nâĂ©tait capable de la distraire. Or, voici la conversation qui sâĂ©tait engagĂ©e sur le blĂ©. CHAPITRE III â Tu penses donc, pays, que notre blĂ© se vendra mal ? disait lâun dont lâextĂ©rieur dĂ©notait un petit bourgeois Ă©tranger, habitant quelque bourgade, en pantalon de coutil tachĂ© de goudron et de graisse. Le personnage auquel il sâadressait Ă©tait vĂȘtu dâune svitka bleue rapiĂ©cĂ©e en diffĂ©rents endroits, et il avait une bosse au front. â Il ne sâagit pas de penser ! je suis prĂȘt Ă me laisser passer une corde autour du cou et Ă me balancer Ă cet arbre comme une saucisse de NoĂ«l au plafond de la chambre, si nous vendons une seule mesure de blĂ©. â Quâest-ce que tu me contes, pays ? Il nây a pas sur le marchĂ© un grain de blĂ© en dehors de celui que nous avons apportĂ©. Dites tout ce que vous voudrez, pensait le pĂšre de notre belle, qui ne perdait pas une parole de la conversation des deux marchands ; cela ne mâempĂȘchera pas dâavoir dix sacs en rĂ©serve. » â Mais câest prĂ©cisĂ©ment oĂč le diable sâen mĂȘle, quâil nây a pas plus Ă tabler lĂ -dessus que sur un Moscovite affamĂ©, reprenait dâun air significatif lâhomme Ă la bosse au front. â Quel diable ? demanda lâhomme au pantalon de coutil. â As-tu entendu ce que lâon dit dans la foule ? continua le front bombĂ© en regardant de cĂŽtĂ© son interlocuteur de ses yeux mornes. â Eh bien ? â Eh bien ! Le commissaire, â puisse-t-il ne jamais tremper sa moustache dans lâeau-de-vie de prunes â le commissaire nous a assignĂ© pour la foire une place si maudite que nous pouvons crever, nous ne vendrons pas un seul grain. Vois-tu ce vieux hangar en ruine lĂ -bas, lĂ -bas, prĂšs de la montagne ici, la curiositĂ© du pĂšre de notre belle le fit se rapprocher encore, et il devint tout oreilles, câest dans ce hangar que les diables prennent leurs Ă©bats, et pas une seule foire ne sâest terminĂ©e sans malheur. Hier encore, le scribe passait par lĂ , et, Ă la lucarne, se montra un groin de porc, grognant si terriblement quâun frisson lui passa dans tout le corps. On sâattend dâun instant Ă lâautre Ă voir apparaĂźtre de nouveau la svitka rouge. â Quâest-ce que cette svitka rouge ? Ă ce moment les cheveux de notre auditeur attentif se dressĂšrent sur sa tĂȘte. Il regarda avec terreur derriĂšre lui et aperçut⊠sa fille et le parobok tranquillement enlacĂ©s, devisant dâamour dans lâoubli le plus complet de toutes les svitkas du monde. Ce spectacle dissipa sa terreur et le ramena Ă son insouciance habituelle. â Eh ! eh ! pays, tu me parais aller bien vite en embrassades. Moi, ce nâest que le quatriĂšme jour aprĂšs la noce que jâai appris Ă embrasser ma Khveska et encore, grĂące Ă mon compĂšre, qui, en sa qualitĂ© de garçon dâhonneur, me mit sur la voie. Le jeune homme comprit immĂ©diatement que le pĂšre de sa bien-aimĂ©e nâĂ©tait pas trĂšs dĂ©sagrĂ©able ; et il se prit Ă combiner un plan pour le mettre dans son jeu. â Toi, mon bon, tu ne me connais probablement pas ; mais moi, je tâai reconnu tout de suite. â Câest possible que tu mâaies reconnu. â Si tu veux, je te dirai et ton nom et ton prĂ©nom et tout ce qui te concerne. Tu tâappelles Solopi Tcherevik. â Câest bien cela, Solopi Tcherevik. â Et regarde-moi bien, peut-ĂȘtre me reconnaĂźtras-tu ? â Non, je ne te connais pas ; et cela soit dit sans te fĂącher. Dans ma longue vie, jâai tant vu de museaux divers, que ce serait le diable de me souvenir de tous⊠â Câest dommage que tu ne te rappelles pas du fils de Holopoupenko ? â Tu serais donc le fils dâOkhrimo ? â Et qui le serait ? Ă moins que ce ne soit le Domovoi[7]. Sur quoi, les deux amis se dĂ©couvrirent et lâembrassade commença. Cependant notre fils Holopoupenko, sans perdre de temps, se hĂąta de couper court Ă cette dĂ©monstration. â Eh bien ! Solopi, comme tu le vois, moi et ta fille nous nous aimons au point de passer lâĂ©ternitĂ© ensemble. â Eh bien ! Paraska, fit Tcherevik en sâadressant avec un sourire Ă sa fille, â peut-ĂȘtre, en effet⊠pour que dĂ©jà ⊠comme on dit⊠ensemble⊠afin quâon paisse la mĂȘme herbe. Eh bien ! tapons lĂ , et allons, beau fils frais Ă©lu, arroser le contrat ! Et tous les trois se trouvĂšrent bientĂŽt rĂ©unis dans une derniĂšre buvette, sous la tente, chez la Juive, au milieu de tout une flotte de bouteilles et de flacons de toutes façons et de toutes tailles. â Eh ! le luron ! Pour cela je tâaime, disait Tcherevik, quelque peu Ă©mĂ©chĂ©, en voyant la façon dont son beau fils frais Ă©lu se versait prĂšs dâun demi-litre dâeau-de-vie, lâavalait dâun trait sans sourciller et brisait sur la table le vase vide. Quâen dis-tu ? Paraska. Quel fiancĂ© je tâai choisi ! regarde ! regarde ! Comme il lampe gaillardement. Et, tout gai et en titubant, il sâachemina avec elle vers sa charrette, pendant que notre parobok se rendait aux boutiques occupĂ©es par les marchands de Gadiatch et de Mirgorod, les deux cĂ©lĂšbres villes du gouvernement de Pullava, pour y choisir une des plus belles pipes en bois, richement montĂ©e sur cuivre, ainsi quâun foulard Ă fleurs sur fond rouge et un bonnet dâAstrakan, cadeaux de noce au beau-pĂšre et aux autres, ainsi que le voulait la coutume. CHAPITRE IV â Eh bien ! femme ! jâai trouvĂ© Ă la fille un fiancĂ©. â Câest ce qui peut sâappeler bien choisir son moment pour chercher des fiancĂ©s ! ImbĂ©cile ! imbĂ©cile ! tu ne changeras donc jamais ? OĂč as-tu vu, oĂč as-tu entendu que des gens sensĂ©s courent Ă cette heure aprĂšs des fiancĂ©s ? Tu aurais mieux fait de tâoccuper de vendre notre blĂ©. Ton fiancĂ©, lui aussi, doit ĂȘtre quelque chose de bien. Le plus gueux, sans doute, de tous les va-nu-pieds. â Quelle erreur ; si tu voyais le jeune homme ! Rien que sa svitka vaut plus que ta camisole verte et que tes bottes rouges ; et comme il siffle bien lâeau-de-vie ! Que le diable mâemporte et toi avec, si de ma vie, jâai vu un parobok avaler comme lui un demi-litre dâun trait sans sourciller ! â Câest cela, un ivrogne doublĂ© dâun vagabond, voilĂ ce quâil lui faut. Je gagerais que câest le mĂȘme vaurien qui nous a pris Ă partie sur le pont. Quel dommage quâil ne me soit pas encore tombĂ© sous la main ! Je vous lâaurais arrangĂ© ! â Et quâimporte ! Khivria, si câĂ©tait lui ? Pourquoi serait-ce un vaurien ? â Pourquoi ce serait un vaurien ! oh ! tĂȘte sans cervelle ! Entendez-vous ? Pourquoi ce serait un vaurien ? Oh avais-tu donc tes yeux dâimbĂ©cile lorsque nous passions prĂšs du moulin, lĂ devant lui, sous son nez sali de tabac ? on dĂ©shonorerait ta femme que cela te laisserait indiffĂ©rent. â Tu auras beau dire, je ne vois pas ce quâon pourrait lui reprocher. Câest un garçon de valeur ; serait-ce parce quâil a un moment couvert de fumier ton museau ? â Eh ! eh ! voyez-vous ! Tu ne me laisses pas placer un mot. Quâest-ce que cela veut dire ? Quand cela tâest-il jamais arrivĂ© ? Tu as dĂ©jĂ , sans doute, pris le temps de licher alors que tu nâas encore rien vendu ? Notre Tcherevik remarqua en effet lui-mĂȘme quâil avait trop parlĂ©, et il se hĂąta de cacher sa tĂȘte dans ses mains, persuadĂ© que son irascible compagne ne tarderait pas Ă planter dans ses cheveux ses griffes conjugales. Diable ! le mariage est flambĂ©, pensait-il en esquivant lâĂ©pouse qui marchait vers lui ; il faudra refuser un bon garçon et pour rien ! Seigneur Dieu ! Pourquoi une pareille plaie sur nous autres pĂ©cheurs ? Il y avait dĂ©jĂ assez de vilaines choses dans ce monde ; et tu nous as encore encombrĂ©s de femmes ! » CHAPITRE V Le jeune homme Ă la svitka blanche, assis prĂšs de sa charrette, regardait distraitement la foule qui bourdonnait sourdemont autour de lui. Le soleil fatiguĂ© quittait lâhorizon aprĂšs avoir brĂ»lĂ© son midi et son matin. Le jour sâĂ©teignait dans le charme et dans lâĂ©clat de la pourpre. Le sommet blanc des tentes brillait dâune clartĂ© aveuglante sous les rayons dâun feu rose Ă peine perceptible. Les vitres des chĂąssis empilĂ©s flambaient sur les tables des cabaretiĂšres ; bouteilles et verres Ă©taient transformĂ©s en autant de flammes. Des montagnes de melons, de pastĂšques et de citrouilles semblaient moulĂ©es en or et en cuivre bruni. Le bruit des conversations devenait sensiblement plus rare et plus sourd. Les langues fatiguĂ©es des marchands, des moujiks et de tziganes se faisaient plus paresseuses et plus lentes. ĂĂ et lĂ , des feux commençaient Ă sâallumer et le fumet odorant des galouschki[8] se rĂ©pandait dans les rues calmĂ©es. â Ă quoi songes-tu si tristement Hirtsko[9], sâĂ©cria un Tzigane de haute taille et hĂąlĂ© par le soleil, en frappant sur lâĂ©paule de notre jeune homme. Voyons ! me laisses-tu tes bĆufs pour vingt ? â Tu nâas de pensĂ©e que pour les bĆufs ! toujours les bĆufs. Votre race ne vit que pour lâargent monnayer, filouter les honnĂȘtes gens. â Fi ! que Diable ! Te voilĂ donc pris bien sĂ©rieusement ! serait-ce le dĂ©pit de tâĂȘtre embarrassĂ©e dâune fiancĂ©e ? â Non, ce nâest pas dans ma nature je tiens ma parole ; quand je fais quelque chose, câest pour toujours, mais câest ce vieux brigand de Tcherevik qui nâa pas de conscience pour un demi-kopek ; il a dit Oui », et maintenant il se reprend. On ne peut guĂšre, dâailleurs, lui en vouloir ; câest une bĂ»che et rien de plus, ce sont lĂ les tours de la vieille sorciĂšre que nous avons, avec les amis, si bien arrangĂ©e aujourdâhui sur le pont. Ah ! si jâĂ©tais Tzar ou grand seigneur, je commencerais par faire pendre tous ces imbĂ©ciles qui se laissent brider par les femmes⊠â Me laisses-tu les bĆufs pour vingt si nous forçons Tcherevik Ă nous rendre Paraska ? Hirtsko le considĂ©ra avec Ă©tonnement. Les traits basanĂ©s du Tzigane exprimaient quelque chose de mĂ©chant, de rusĂ©, de bas et de hautain en mĂȘme temps ; il suffisait dâun regard pour se convaincre que, dans cette Ăąme Ă©trange, bouillonnaient de grandes qualitĂ©s, mais de celles qui nâont sur la terre quâune seule rĂ©compense le gibet. Une bouche disparaissait presque entre le nez et le menton, pointue et toujours animĂ©e dâun mauvais sourire ; des yeux petits mais vifs comme le feu ; un visage sillonnĂ© de lâĂ©clair des projets et des combinaisons sans cesse modifiĂ©s. Tout cela semblait comme exiger un costume aussi particulier et aussi extraordinaire que celui quâil portait effectivement. Un cafetan brun-noir que le moindre attouchement paraissait devoir faire tomber en poussiĂšre ; de longs cheveux noirs tombant en broussailles sur ses Ă©paules ; des souliers emboĂźtant des pieds nus et brĂ»lĂ©s ; tout cela semblait comme soudĂ© Ă lui et faire partie de son ĂȘtre. â Ce nâest pas pour vingt, mais pour quinze que tu les auras si tu ne mens pas, rĂ©pondit le jeune homme, sans le quitter de son regard pĂ©nĂ©trant. â Pour quinze, câest entendu ! mais ne pas oublier, pour quinze. Et voici cinq roubles dâarrhes. â Mais si tu mâas menti ! â Si je mens, Ă toi les arrhees. â Câest entendu. Allons ! topons. â Allons ! CHAPITRE VI â Par ici, Aphanasi Ivanovitch. Il y a une haie. Levez le jarret, mais ne craignez rien. Mon imbĂ©cile est parti pour toute la nuit avec le compĂšre pour veiller sur les charrettes, de peur que les Moscovites ne chipent quelque chose. Câest ainsi que la terrible compagne de Tcherevik encourageait dâun ton affable le popovitch[10] qui, sâaccrochant peureusement Ă la clĂŽture, grimpa sur la haie et y resta debout, hĂ©sitant comme un long et effrayant fantĂŽme. AprĂšs avoir longtemps cherchĂ© de lâĆil la place oĂč sauter le plus facilement, il finit par tomber lourdement dans les hautes herbes. â Malheur ! ne vous ĂȘtes-vous pas fait de mal ? Ne vous ĂȘtes-vous pas â Dieu vous en garde â cassĂ© le cou? murmurait Khivria tout inquiĂšte. â Chut ! rien, rien, ma trĂšs chĂšre Khavronia Nikiforovna, fit le popovitch dâune voix basse et plaintive en se dressant sur ses jambes, rien que des piqĂ»res dâorties, cette plante vipĂ©rine, comme disait le dĂ©funt protopope. â Entrez donc vite dans la khata. Il nây a personne. Et moi qui me demandais si vous nâĂ©tiez pas retenu par un furoncle ou un mal de ventre. On ne vous voit plus. Comment cela va-t-il? Jâai entendu dire que le pope, votre pĂšre, a reçu un tas de choses. â Presque rien, Khavronia Nikiforovna, mon pĂšre nâa reçu pour tout le carĂȘme que quinze sacs de blĂ©, quatre de millet, une centaine de pains au beurre et des poulets qui, bien comptĂ©s, ne dĂ©passent pas la cinquantaine. Quant aux Ćufs, ils sont en partie gĂątĂ©s ; mais le plus prĂ©cieux de tous les dons, câest de vous seule que je peux le tenir, Khavronia Nikiforovna, continua le popovitch, en la regardant tendrement et en se rapprochant dâelle. â VoilĂ , Aphanasi Ivanovitch, fit-elle, en posant sur la table divers plats et en boutonnant dâun air confus sa camisole qui sâĂ©tait ouverte comme par hasard, des vareniki[11], des galouchetchki[12] de froment, des pampouchetchki[13], des tovtchenitchki[14]. â Tout cela, je gage, est sorti des plus habiles mains de toutes les filles dâĂve, dit le popovitch en entamant les tovtchenitchki et en attirante Ă lui, de lâautre main, les varenitchki. Cependant, Khavronia Nikiforovna, mon cĆur a soif dâautres choses plus douces que les pampouchetchki et tous les galouchetchki â Je ne sais rĂ©ellement plus ce que je pourrais vous offrir encore, Aphanasi Ivanovitch, rĂ©pondit la belle obĂšse en feignant de ne pas comprendre. â Mais votre amour ! mon incomparable Khavronia Nikiforovna, murmura le popovitch, tenant dâune main un varenik et, de lâautre, enlaçant la large taille de la matrone. â Dieu sait ce que vous imaginez ! Aphanasi Ivanovitch, dit Khidria en baissant pudiquement les yeux, vous allez peut-ĂȘtre encore entreprendre de mâembrasser ! â Quant Ă cela, je vous dirai, en ce qui me concerne, reprit le popovitch, quâau temps pour ainsi dire oĂč jâĂ©tais au sĂ©minaire je me souviens encore comme aujourdâhui⊠à ce moment, des aboiements se firent entendre dans la cour et des coups furent frappĂ©s Ă la porte cochĂšre. Khivria sortit prĂ©cipitamment et rentra toute pale. â Allons ! Aphanasi Ivanovitch, nous sommes pris ! Un tas de gens frappent Ă la porte et il me semble avoir reconnu la voix du compĂšre. Le varenik sâarrĂȘta dans la gorge du popovitch⊠ses yeux sortirent de leurs orbites, comme sâil sâĂ©tait trouvĂ© en face de quelque revenant. â Vite, grimpez lĂ , criait Khivria Ă©pouvantĂ©e, en lui indiquant les planches reposant sur deux solives juste au-dessous du plafond et sous lesquelles Ă©taient entassĂ©s divers ustensiles de mĂ©nage. Le pĂ©ril donna des forces Ă notre hĂ©ros. Revenant un peu Ă lui, il sauta sur la partie du poĂȘle qui sert de lit, et de lĂ , avec prĂ©caution, il se hissa sur les planches, tandis que Khivria courait Ă toutes jambes vers la porte, car les coups redoublaient, frappĂ©s avec plus de force et dâimpatience. VII Un Ă©trange Ă©vĂ©nement sâĂ©tait produit Ă la foire. Le bruit courait que, quelque part, parmi les marchandises, la svitka rouge devait faire son apparition. La vieille qui vendait des boubliki[15] crut voir Satan au museau de cochon qui se penchait sans cesse sur les charrettes comme sâil cherchait quelque chose. Cela se rĂ©pandit rapidement dans tous les coins du campement silencieux; et tout le monde eĂ»t considĂ©rĂ© comme un crime de ne pas y ajouter foi, bien que la marchande de boubliki, dont lâĂ©talage mobile attenait Ă la tente du cabaretier, se fĂ»t livrĂ©e toute la journĂ©e Ă des saluts sans objet et dessinĂąt de ses jambes des courbes empruntĂ©es Ă ses gĂąteaux. Ă cela, sâajoutaient encore les histoires grossies de bouche Ă bouche du prodige vu par le scribe dans le hangar en ruine, de telle sorte quâavec la nuit, chacun se serrait plus prĂšs de son voisin. La tranquillitĂ© disparut; la peur empĂȘchait les yeux de se fermer ; et ceux qui nâĂ©taient pas des plus braves et qui purent se procurer un coin dans une izba[16], sây rĂ©fugiĂšrent. Au nombre de ces derniers, se trouvaient Tcherevik avec son compĂšre et sa fille ; et ce sont eux, qui renforcĂ©s de quelques camarades, leur ayant demandĂ© asile, ont causĂ© le tapage qui a si fort effrayĂ© notre Khivria. Le compĂšre Ă©tait dĂ©jĂ quelque peu Ă©mĂ©chĂ©. Cela rĂ©sultait de ce quâil dut faire deux fois avec sa charrette le tour de la cour avant de trouver la porte de sa khata. Les hĂŽtes, eux aussi, Ă©taient dâhumeur joyeuse et, sans plus de façon, ils pĂ©nĂ©trĂšrent dans la chambre avec le maĂźtre. LâĂ©pouse de notre Tcherevik Ă©tait assise comme sur des aiguilles quand ils se mirent Ă fureter dans tous les coins. â Eh quoi ! commĂšre, sâĂ©cria le compĂšre en entrant, la fiĂšvre te fait toujours trembler ! â Oui, je ne me sens pas bien, rĂ©pondit Khivria en jetant un regard inquiet sur les planches au-dessous du plafond. â Voyons, femme, va-tâen me chercher la bouteille dans la charrette, dit le compĂšre Ă son Ă©pouse qui le suivait. Nous la viderons avec ces braves amis ; les maudites femmes nous ayant fait une peur telle quâil est presque honteux de lâavouer. Car, au fond, frĂšres, nous nous sommes rĂ©fugiĂ©s ici inutilement, continua-t-il, en vidant Ă petites gorgĂ©es la cruche de terre. Je suis prĂȘt Ă percer mon neuf, que les femmes se sont tout simplement moquĂ©es de nous. En admettant mĂȘme que ce fĂ»t le diable, que nous importe le diable ? Crachez-lui Ă la figure ! Quâil sâavise Ă lâinstant mĂȘme de se dresser ici devant moi ! et que je ne sois quâun fils de chien si je ne lui fais pas la nique. â Pourquoi, alors, es-tu devenu si pĂąle ? sâĂ©cria lâun des Ă©trangers qui dominait les autres de la tĂȘte et posait pour le brave. â Moi ! Dieu vous patafiole ! vous avez rĂȘvĂ©. Les hĂŽtes ne purent rĂ©primer un sourire auquel sâassocia dâun air de satisfaction le bravache qui avait pris la parole. â Comment pourrait-il parler, fit observer un autre, alors que ses joues flamment comme le coquelicot ? Ce nâest plus un oignon mais une betterave, ou mieux encore la svitka rouge qui a tant Ă©pouvantĂ© les gens. La bouteille fit le tour de la table et aug-menta encore la gaĂźtĂ© des convives. Notre Tcherevik, que la svitka rouge nâavait pas cessĂ© de torturer, ne laissant pas une seconde de rĂ©pit Ă son esprit curieux, sâapprocha alors du compĂšre. â Dis, par grĂące, compĂšre, Jâai beau questionner, je ne puis connaĂźtre lâhistoire de cette satanĂ©e svitka. â Eh ! compĂšre, ces choses-lĂ ne se racontent pas la nuit, mais pour te faire plaisir ainsi quâaux braves amis qui mâont lâair dây tenir autant que toi, soit⊠Ăcoutez. Il se gratta lâĂ©paule, sâessuya la bouche avec le pan de son cafetan, appuya la main sur la table et commença â Une fois, pour quel crime, câest ce que jâignore, tout ce que je sais câest quâun diable fut chassĂ© de lâenfer. â Comment cela, compĂšre, interrompit Tcherevik, est-il possible quâon chasse un diable de lâenfer ? â Quây pourrais-je, compĂšre ? On lâa chassĂ© et voilĂ tout, comme un moujik chasse un chien de sa khata. Peut-ĂȘtre sâĂ©tait-il avisĂ© de commettre quelque bonne action, et, alors, on lui a montrĂ© la porte. Or, ce pauvre diable sâennuyait hors de lâenfer, mais sâennuyait Ă se pendre. Que faire ? Il se mit alors Ă boire de dĂ©sespoir, Il se nicha dans ce mĂȘme hangar que tu as vu en ruines prĂšs de la montagne, et auprĂšs duquel aucun honnĂȘte homme ne peut plus dĂ©sormais passer, sans ĂȘtre prĂ©alablement armĂ© du signe de croix. Et ce diable est un homme dâun dissolu Ă rendre des points aux parobki. Du matin au soir, il ne dĂ©marre pas du cabaret. Ă ce moment, le grave Tcherevik interrompit de nouveau notre conteur. â Que dis-tu lĂ , compĂšre ? Comment est-il possible quâon ait laissĂ© entrer le diable au cabaret ? Il a bien, grĂące Ă Dieu, des griffes aux pattes et de petites cornes sur la tĂȘte. â Sans doute ! mais il sâĂ©tait muni de bonnet et de mitaines ; impossible, par suite, de le reconnaĂźtre. Il noçait, noçait⊠Enfin il avait bu tout ce quâil possĂ©dait. Le cabaretier eut beau lui faire longtemps crĂ©dit, finalement, il dut cesser. Le diable fut alors forcĂ© de changer sa svitka rouge pour un tiers de sa valeur au juif qui tenait le cabaret de la foire de Sorotchinetz. Il la lui engagea et lui dit Prends garde, juif, je viendrai chercher la svitka dans un an jour pour jour. Conserve-la. » Et il disparut comme sâil fĂ»t tombĂ© dans lâeau. Le juif examina attentivement la svitka. Le drap en Ă©tait de telle qualitĂ© que mĂȘme Ă Miregorod on nâaurait pu en trouver de semblable. Le rouge flambait comme le feu ; impossible une fois vu dâen dĂ©tacher ses yeux. Le juif se fatigua dâattendre lâĂ©chĂ©ance. Il se gratta lâoreille[17], et il en tira de quelque seigneur de passage jusquâĂ cinq piĂšces dâor. Mais voilĂ quâun soir un homme entre. Eh bien ! juif, rends-moi ma svitka. » Le juif ne le reconnut pas dâabord, mais, aprĂšs lâavoir remis, il feignit de ne lâavoir jamais vu. â Quelle svitka ? je nâai pas de svitka. » Lâautre sâen alla. Seulement, vers le soir, quand le juif ayant fermĂ© sa boutique et aprĂšs avoir comptĂ© son argent, se mit, un drap sur la tĂȘte, Ă prier Dieu Ă la façon juive, un frĂŽlement sâentendit ! â Le juif regarde ! Ă toutes les fenĂȘtres apparaissaient des museaux de cochon⊠à ces mots, prĂ©cisĂ©ment, on entendit un bruit indistinct qui ressemblait fort au grognement du porc. Tous pĂąlirent⊠La sueur perla sur le visage du conteur. â Quoi ? demanda Tcherevik, effrayĂ©. â Rien ! rĂ©pondit le compĂšre tremblant de tout son corps. â Rien ! fit Ă son tour lâun des assistants. â Câest toi qui disais ?⊠â Moi ! â Quoi donc ? Ă propos ?⊠â Dieu sait pourquoi tout cet Ă©moi ! il nây a rien. Tous se mirent Ă examiner craintivement autour dâeux et Ă chercher dans les recoins. Khivria Ă©tait plus morte que vive. â Quelles femmes vous faites ! dit-elle Ă haute voix. Et vous vous appelez des Cosaques et vous ĂȘtes des hommes Il faudrait vous mettre une quenouille Ă la main. Quelquâun peut-ĂȘtre sâest⊠Dieu me pardonne⊠Sous quelquâun le banc a craquĂ© et cela a suffi pour vous affoler tous. Cette sortie fit honte Ă nos braves et les obligea de reprendre courage. Le compĂšre but son coup et poursuivit son rĂ©cit â Le juif sâĂ©vanouit dâeffroi ; mais les cochons, sur leurs longues jambes comme des Ă©chasses, pĂ©nĂ©trĂšrent par les fenĂȘtres et le firent vite revenir Ă lui Ă coups dâĂ©triviĂšres et le forcĂšrent Ă danser plus haut que cette solive. Le juif se jeta Ă leurs pieds et avoua tout⊠mais le difficile Ă©tait de retrouver la svitka. VolĂ©e au seigneur par un tzigane, elle avait Ă©tĂ© vendue Ă une marchande. Celle-ci la porta de nouveau Ă la foire de Sorotchinetz, mais, depuis lors, personne ne lui achetait quoi que ce soit. La marchande sâĂ©tonna, sâĂ©tonna longtemps et finit par comprendre que la faute en Ă©tait Ă la svitka rouge. Ce nâest pas pour rien quâen lâendossant elle se sentait toujours gĂȘnĂ©e. Sans plus de rĂ©flexion, elle la jeta au feu. â Il ne brĂ»le pas, ce satanĂ© vĂȘtement !⊠HĂ© ! mais !⊠câest un cadeau du diable ! » â La marchande lâintroduisit sous la charrette dâun moujik venu pour vendre son beurre. LâimbĂ©cile sâen rĂ©jouit ; seulement personne plus ne lui achetait de beurre. Hein ! ce sont des mains ennemies qui mâont glissĂ© cette svitka ! » Il saisit sa hache et la mit en piĂšces. Mais voilĂ que les morceaux rampent les uns vers les autres et que la svitka est de nouveau entiĂšre. Se signant alors, il assĂ©na un second coup de hache, sema les morceaux Ă droite et Ă gauche et sâenfuit. Depuis, chaque annĂ©e, juste Ă lâĂ©poque de la foire, le diable au museau de cochon se promĂšne par toute la place, grognant et ramassant les morceaux de la svitka. On dit maintenant quâil ne lui manque plus que la manche gauche. Les gens, depuis lors, se signent Ă lâendroit ; et voilĂ une dizaine dâannĂ©es dĂ©jĂ que la foire ne sây tenait plus, lorsque le malin a poussĂ© le commissaire de⊠à en⊠La fin du mot resta sur les lĂšvres du conteur la fenĂȘtre vola en Ă©clats et, Ă travers les vitres brisĂ©es, apparut un museau de cochon roulant de terribles yeux et ayant lâair de demander Que faites-vous ici, braves gens ? » CHAPITRE VIII La terreur cloua tout le monde dans la khata. Le compĂšre, la bouche bĂ©e, fut transformĂ© en pierre. Ses yeux jaillirent comme des projectiles. Ses doigts Ă©carquillĂ©s sâarrĂȘtĂšrent immobiles en lâair. Le brave, de haute taille, dans une Ă©pouvante impossible Ă maĂźtriser, sauta jusquâau plafond et frappa de sa tĂȘte contre la solive. Les planches sâĂ©cartĂšrent et le popovitch, avec tonnerre et fracas, vola par terre. â AĂŻe ! aĂŻe ! aĂŻe ! sâĂ©cria dĂ©sespĂ©rĂ©ment lâun des assistants en tombant tout terrifiĂ© sur le banc et en agitant les bras et les jambes. â Au secours ! exclamait dĂ©sespĂ©rĂ©ment un autre en se couvrant de son touloupe[18]. TirĂ© de sa pĂ©trification par ce nouvel effroi, le compĂšre se traĂźna Ă quatre pattes, tout tremblant, sous les jupons de son Ă©pouse. Le brave de haute taille grimpa dans le four du poĂȘle malgrĂ© lâĂ©troitesse de lâouverture, en refermant la porte derriĂšre lui ; et Tcherevik, comme Ă©chaudĂ©, prenant un pot de fer pour son bonnet, sâen coiffant, se prĂ©cipita dehors et courut comme un fou Ă travers les rues sans toucher presque terre. La fatigue seule lâobligea de ralentir sa course. Son cĆur battait comme une meule de moulin. La sueur lâinondait. EpuisĂ©, il Ă©tait sur le point de sâaffaisser, quand, tout Ă coup, il entendit derriĂšre lui quelquâun Ă sa poursuite⊠La respiration lui manqua. â Le Diable ! Le Diable ! criait-il hors de lui, en faisant appel Ă toutes ses forces, et, un moment aprĂšs, il tomba sans connaissance. â Le Diable ! Le Diable ! criait-on derriĂšre lui ; et tout ce quâil put sentir encore câest que quelque chose sâabattit sur lui. Le vide se fit alors complĂštement dans son cerveau et, comme lâhĂŽte terrible de lâĂ©troite biĂšre », il resta muet et immobile au milieu de la route. CHAPITRE IX â Entends-tu, Vlas ? disait en se soulevant au milieu de la nuit, un de ceux qui dormaient dans la rue. Quelquâun, tout prĂšs dâici a appelĂ© le diable. â Que mâimporte ! grogna en sâĂ©tirant un tzigane couchĂ© Ă ses cĂŽtĂ©s, il pourrait aussi bien appeler tous ses parents. â Mais il a criĂ© comme si on lâĂ©touffait ! â De quoi nâest pas capable un homme pris de sommeil ? â Comme tu voudras, mais il faut aller voir. Bats donc le briquet. Lâautre tzigane, en maugrĂ©ant, se leva sur ses jambes, fit jaillir Ă doux reprises une Ă©tincelle qui passa sur lui comme un Ă©clair, et, aprĂšs avoir soufflĂ© sur lâamadou, se mit en marche, un kaganetz[19] Ă la main. â Halte ! il y a quelque chose Ă terre ; Ă©claire par ici. Dâautres personnes sâĂ©taient jointes Ă eux. â Quâest-ce, Vlas ? â On dirait deux hommes ; lâun dessus et lâautre dessous. Lequel des deux est le diable ? câest ce que je ne puis pas reconnaĂźtre. â Et qui est dessus ? â Une baba femme. â Alors, câest ça qui est le diable. Un Ă©clat de rire gĂ©nĂ©ral rĂ©veilla toute la rue. â Une baba grimpĂ©e sur un homme ! Allons, cette baba doit sâentendre en monture ! disait quelquâun dans la foule. â Regardez, frĂšres ! â fit un autre en ramassant un fragment du pot de fer dont une moitiĂ© seulement restait sur la tĂȘte de Tcheverik, â de quel bonnet ce brave homme sâest coiffĂ© ! Le bruit et les rires qui augmentaient, finirent par rappeler Ă la vie nos deux morts, Solopi et son Ă©pouse, pleins encore de la frayeur passĂ©e et regardant avec terreur, de leurs yeux fixes, les visages basanĂ©s des tziganes. Ă la lumiĂšre fausse et tremblante des kaganetz, ceux-ci ressemblaient Ă une bande hideuse de gnomes enveloppĂ©s dâune pesante vapeur souterraine dans les tĂ©nĂšbres dâune nuit sans rĂ©veil. CHAPITRE X La fraĂźcheur du matin soufflait sur les habitants rĂ©veillĂ©s de Sorotchinetz. Des bouffĂ©es de fumĂ©e sâenvolaient de toutes les cheminĂ©es Ă la rencontre du soleil levant. La foire se ranima. Les moutons se mirent Ă bĂȘler, les chevaux Ă hennir et, de nouveau, les cris des oies et des marchandes emplirent tout le campement ; les racontars effrayants sur la svitka rouge, qui avaient tant Ă©pouvantĂ© le monde dans les heures mystĂ©rieuses de la nuit, sâĂ©vanouirent avec lâapparition du matin. En bĂąillant et en sâĂ©tirant, Solopi Tcherevik somnolait chez le compĂšre sous le hangar couvert de paille, au milieu des bĆufs, des sacs de farine et de blĂ©. Il ne paraissait nullement disposĂ© Ă sâarracher Ă ses rĂȘveries, lorsque, tout Ă coup, il entendit une voix qui lui Ă©tait aussi familiĂšre que le refuge de sa paresse, le poĂȘle bĂ©ni de sa khata ou le cabaret dâune parente installĂ©e Ă dix pas de chez lui. â Debout ! debout ! lui scandait Ă lâoreille sa tendre Ă©pouse, en le tirant de toutes ses forces par le bras. Tcherevik, pour toute rĂ©ponse, enfla les joues et simula, de ses mains, le battement des tambours. â Idiot ! sâĂ©cria-t-elle en Ă©vitant le bras qui faillit lâatteindre au visage. Tcherevik se souleva, se frotta les yeux et regarda autour de lui. â Que le diable mâemporte, ma colombe, si ton museau ne mâa pas fait lâeffet dâun tambour sur lequel je me voyais forcĂ© de battre la diane, comme un superbe Moscovite ; museau de cochon dont, comme dit le compĂšre⊠â Assez, assez de sottises. DĂ©pĂȘche-toi donc dâaller vendre la jument. Câest Ă faire rire de nous, vraiment. Ătre venus Ă la foire, et nâavoir pas mĂȘme vendu une poignĂ©e de chanvre ! â Que dis-tu femme ? interrompit Solopi â mais câest maintenant quâon va rire. â Va, va ; on rit dĂ©jĂ assez sans cela. â Je sais bien que je ne suis pas encore dĂ©barbouillĂ©, continua Tcherevik en bĂąillant et en se grattant le dos pour gagner du temps Ă sa paresse, â VoilĂ quâil lui prend mal Ă propos la fantaisie dâĂȘtre propre ! Cela tâest-il jamais arrivĂ© ? voilĂ une serviette ; essuie ton masque. Et elle saisit quelque chose roulĂ© en tas quâelle rejeta brusquement avec terreur ; câĂ©tait la manche rouge de la svitka. â Va faire ton affaire, reprit-elle en rassemblant ses esprits et en voyant que la peur cassait les jambes de son Ă©poux et que ses dents claquaient. â Jâen aurai maintenant une vente, murmura-t-il en dĂ©tachant la jument et la conduisant sur la place. Ce nâest pas sans cause quâen mes prĂ©paratifs pour cette maudite foire, je me sentais un poids comme si quelquâun mâavait jetĂ© sur les Ă©paules une vache crevĂ©e. Et les bĆufs qui, dâeux-mĂȘmes, se sont par deux fois retournĂ©s vers la maison ! Sans compter, si je me souviens bien, que câest un lundi que nous nous sommes mis en route. De lĂ , tout le malâŠâŠ Et ce maudit diable qui ne veut pas se tenir tranquille ! Quâest-ce que ça peut lui faire de porter une svitka qui nâa quâune manche ! mais non. Il ne veut pas laisser la paix aux honnĂȘtes gens. Si jâĂ©tais un diable, moi, par exemple ce dont Dieu me garde ! est-ce que je me dĂ©mĂšnerais la nuit Ă la recherche dâun maudit chiffon ! Ici le monologue de notre Tcherevik fut interrompu par une voix grave et criarde. Le tzigane de haute taille Ă©tait devant lui. â Quâest-ce que tu vends ? mon brave. Le vendeur eut un silence. Il examina son interlocuteur des pieds Ă la tĂȘte et dit dâun air tranquille, sans sâarrĂȘter et sans lĂącher la bride â Tu sais bien toi-mĂȘme ce que je vends. â Des courroies ? demanda le tzigane en regardant la bride. â Oui, des courroies, si une jument ressemble Ă des courroies. â Mais diantre, pays, tu lâas donc nourrie avec de la paille ? â De la paille ! Et Tcherevik tira sur la bride pour faire passer devant lui la jument et convaincre de mensonge ce calomniateur effrontĂ© mais avec une vitesse extraordinaire sa main vint frapper son menton. Il regarda et que vit-il ? Dans sa main il nâa plus quâune bride et, Ă la bride est attaché⊠à terreur ! ses cheveux se dressent sur sa tĂȘte⊠un morceau de la manche rouge de la svitka !⊠Il cracha, se signa et, en agitant les bras, il sâenfuit de ce cadeau inattendu, et, plus rapide quâun jeune homme, se perdit dans la foule. CHAPITRE XI â ArrĂȘtez-le ! arrĂȘtez-le ! criaient plusieurs jeunes gens dans le fond Ă©troit dâune rue ; et Tcherevik se sentit tout Ă coup saisi par des mains vigoureuses. â Quâon le garrotte ! câest lui qui a volĂ© au brave homme sa jument ? â Que Dieu soit avec vous ! Pourquoi me garrottez-vous ? â Et câest lui qui le demande ! Pourquoi as-tu volĂ© la jument ? â Ătes-vous fous ? jeunes gens. OĂč a-t-on vu quâun homme puisse se voler lui-mĂȘme ? â Connu ! connu ! Pourquoi te sauvais-tu Ă toutes jambes comme si Satan lui-mĂȘme Ă©tait Ă tes trousses⊠â On se sauverait Ă moins quand un vĂȘtement diabolique⊠â HĂ© ! mon pigeon, conte cela Ă dâautres. Tu auras encore affaire au commissaire qui tâapprendra Ă faire peur aux gens avec tes diableries. â ArrĂȘtez-le ! arrĂȘtez-le. Ce cri retentit de nouveau Ă lâautre bout de la rue. Le voilĂ ! le voilĂ , le fuyard ! Et, aux yeux de notre Tcherevik, apparut le compĂšre dans le plus piteux Ă©tat, les mains liĂ©es derriĂšre le dos et conduit par plusieurs jeunes gens. â Que de miracles il se fait ! disait lâun de ceux-ci. Si vous entendiez ce que raconte ce filou ! quâil suffit de regarder en face pour reconnaĂźtre un voleur, quand on sâavise de lui demander pourquoi il courait comme un affolĂ©. Je fouillais, dit-il, dans ma poche pour y prendre une prise, et, au lieu de ma tabatiĂšre, jâai retirĂ© un morceau de la diabolique svitka qui flamba soudain comme du feu⊠et je mâenfuis Ă toutes jambes. » â HĂ© ! hĂ© ! ce sont deux oiseaux du mĂȘme nid, garrottez-les ensemble. CHAPITRE XII â Peut-ĂȘtre, en effet, compĂšre, as-tu chipĂ© quelque chose ? demanda Tcherevik Ă©tendu, liĂ© Ă son compĂšre, dans une botte de paille. â Comment ! toi aussi ? compĂšre ? Que me sĂšchent bras et jambes si jamais jâai volĂ© quoi que ce soit, si ce nâest des vareniki Ă la crĂšme, chez ma mĂšre, et encore nâavais-je que dix ans. â Pourquoi donc, compĂšre, un pareil calamitĂ© sur nous ? Toi encore, ce nâest rien On ne tâaccuse que dâavoir volĂ© autrui ! mais quâai-je fait pour ĂȘtre en butte Ă une calomnie aussi idiote mâĂȘtre volĂ© Ă moi-mĂšme ma propre jument ! Il Ă©tait Ă©crit, compĂšre, que nous ne devions pas avoir de chance. â Malheur Ă nous ! pauvres orphelins. Et les deux compĂšres se mirent Ă sangloter bruyamment. â Quâas-tu donc Solopi ? demanda Hirtzko qui entra en ce moment â qui tâa garrottĂ© ? â Ah ! Halopoupenko ! Halopoupenko ! sâĂ©cria Solopi tout joyeux â le voilĂ , compĂšre, celui-lĂ mĂȘme dont je tâai parlĂ©. HĂ© ! camarade, que Dieu me tue sur place, sâil nâa pas lampĂ© devant moi une cruche presque aussi grosse que ta tĂȘte, et sans seulement sourciller. â Pourquoi donc, compĂšre, nâas-tu pas fait honneur Ă un aussi brave parobki ? â Comme tu vois, continua Tcherevik en sâadressant a Hirtzko, Dieu mâa puni probablement parce que je suis en faute Ă son Ă©gard. Pardonne-moi, mon brave. Pour toi, je serais prĂȘt Ă tout faire, mais que veux-tu, câest le diable qui est dans la ville. â Je ne te tiens pas rancune, Solopi ; si tu veux, je te dĂ©barrasserai de tes liens. Et il fit signe aux jeunes gens, et ceux-lĂ mĂȘme qui gardaient les prisonniers sâempressĂšrent de les dĂ©lier. â En revanche, agis bien de ton cĂŽtĂ© ; marie-nous, et que lâon danse au point que pendant toute une annĂ©e les jambes nous fassent mal. â Bien ! voilĂ qui est bien ! dit Solopi en battant des mains, et je me revois aussi gai en ce moment, que si les Moscovites mâavaient enlevĂ© ma vieille. Il nây a plus Ă rĂ©flĂ©chir, Ă tort ou Ă raison, aujourdâhui on se marie et tout est dit. â Prends bien garde, Solopi, dans une heure je serai chez toi, car on tâattend pour acheter ta jument et ton blĂ©. â Comment ! est-ce quâon aurait retrouvĂ© la jument ? â On lâa retrouvĂ©e. Tcherevik demeurait immobile de joie en suivant des yeux Hirtzko qui sâĂ©loignait. â Eh bien ! Hirtzko, lâaffaire a-t-elle Ă©tĂ© bien menĂ©e ? demanda le tzigane de haute taille au jeune homme qui pressait le pas ; les bĆufs sont Ă moi, maintenant ? â Ă toi ! Ă toi ! CHAPITRE XIII Son joli menton dans la main, Paraska Ă©tait assise songeuse et seule dans la khata. Les rĂȘves, en grand nombre, voltigeaient autour de sa tĂȘte blonde. De temps Ă autre un sourire lĂ©ger effleurait ses petites lĂšvres pourpres et une sorte dâĂ©motion joyeuse soulevait ses sombres sourcils. Dâautres fois, un nuage dâinquiĂ©tude les abaissait de nouveau sur le brun de ses yeux. Que devenir si ce quâil a dit ne se rĂ©alise pas ? murmurait-elle avec une expression de doute. Que devenir si on ne me marie pas ? Si⊠mais non⊠cela ne sera pas. Ma marĂątre fait tout ce qui lui passe par lâesprit. Est-ce que je ne peux pas en faire autant ? Je saurai moi aussi mâentĂȘter. Quâil est beau ! Comme ses yeux noirs brillent merveilleusement. Comme il dit Ma Parasiou »[20] chĂ©rie ! Comme sa svitka blanche lui va bien. Il lui faudrait une ceinture plus Ă©clatante ; il est vrai que jâaurai le temps de lui en broder lorsque nous serons en mĂ©nage⊠Je ne puis penser sans joie, continua-t-elle en tirant de son sein un petit miroir doublĂ© de papier rouge, achetĂ© Ă la foire, et en sây regardant avec un vrai plaisir â je ne puis penser sans joie au jour oĂč je la rencontrerai quelque part ! Je ne la saluerai pour rien au monde, dĂ»t-elle en crever. Non marĂątre, tu as assez battu ta belle-fille ! le sable germera sur la pierre et le chĂȘne se penchera sur lâeau comme un saule pleureur, plutĂŽt que je mâincline devant toi. Ah ! oui⊠jâoubliais⊠je veux essayer le bonnet[21] mĂȘme de la marĂątre pour voir comment il me va. » Elle se leva le miroir dans la main et la tĂȘte inclinĂ©e sans le quitter des yeux, elle marcha timidement Ă travers la chambre comme si elle craignait de tomber en voyant sous elle, au lieu du sol, le plafond avec ses planches dâoĂč Ă©tait dĂ©gringolĂ© le popovitch et ses rayons garnis de poteries. â Quelle enfant je fais, sâĂ©cria-t-elle en riant ; jâai peur de faire un pas ! Et elle se mit Ă frapper du pied ; et plus elle allait, plus elle activait le mouvement. Finalement, sa main gauche sâĂ©tablit sur sa hanche, et elle se prit Ă danser en faisant rĂ©sonner le cuivre de ses talons, en tenant devant elle le miroir et en fredonnant sa chanson favorite Petite plante verte, Couche-toi plus bas, Et toi, mon aimĂ© aux sourcils noirs, Approche-toi plus prĂšs. Petite plante verte, Couche-loi plus bas encore Et toi, mon aimĂ© aux sourcils noirs, Approche-toi plus prĂšs encore. Ă ce moment Tcherevik passa sa tĂȘte par la porte, et, apercevant sa fille devant le miroir, sâarrĂȘta. Longtemps il regarda souriant Ă cette fantaisie inattendue de la jeune fille, laquelle tout absorbĂ©e ne semblait rien voir. Mais quand il entendit lâair connu de la chanson, il campa ses poings sur les hanches, sâavança fiĂšrement et se mit lui-mĂȘme Ă danser, oubliant toutes ses affaires. Un gros rire du compĂšre les fit tressaillir tous deux. â HĂątez-vous ! le fiancĂ© est arrivĂ©. â Bravo ! le pĂšre et la fille font ici la noce tout seuls. Ă ces derniers mois, Paraska devint plus rouge que le ruban Ă©carlate qui nouait ses cheveux et lâoublieux pĂšre se rappela pourquoi il Ă©tait venu. â Eh bien ! fille, viens vite. Khivria, toute joyeuse que jâaie vendu la jument, a couru, dit-il en regardant craintivement autour de lui â a couru sâacheter des jupons et autres chiffons. Il faut donc en finir avant sa rentrĂ©e. Ă peine Paraska eut-elle franchi le seuil de la khata quâelle se sentit dans les bras du jeune homme Ă la svitka blanche qui, avec tout une bande, lâattendait dans la rue. â Que Dieu vous bĂ©nisse ! â dit Tcherevik, en joignant leurs deux mains â vivez unis comme les fleurs dâune couronne. Il se produisit Ă cet instant un mouvement dans la foule. â Je crĂšverai plutĂŽt que de laisser la chose sâaccomplir ! â criait la compagne de Solopi â que les gens repoussaient avec des rires. â Ne tâenrage pas ! ne tâenrage pas ! femme â dit avec sang-froid Tcherevik, en sâapercevant quâune paire de vigoureux tziganes sâĂ©taient emparĂ©s des bras de son Ă©pouse, â ce qui est fait est fait ; je nâaime pas Ă revenir sur ce qui est convenu. â Non, non ! ce ne sera pas, criait Khivria ; mais personne ne lâĂ©coutait. De nombreux couples entourĂšrent le nouveau couple et formĂšrent autour de lui une haie dansante, infranchissable. Un sentiment Ă©trange et inexprimable aurait envahi le spectateur, Ă voir comment un seul coup dâarchet du musicien, en svitka de bure et aux longues manchettes pendantes, suffit Ă rĂ©tablir lâharmonie et lâunitĂ© dans cette foule aux sentiments les plus divers. Des hommes, sur le visage morne desquels il semblait quâun sourire nâeĂ»t jamais glissĂ©, battaient la mesure des pieds et des Ă©paules. Tout sâĂ©lançait, tout dansait. Mais plus Ă©trange et plus inexprimable encore Ă©tait le spectacle des vieilles, dont le visage antique exhalait une indiffĂ©rence de tombeau, et qui se bousculaient au milieu de cette jeunesse riante, vivante. Insouciantes, sans mĂȘme une joie enfantine, sans une Ă©tincelle de sympathie, celles que lâalcool seul poussait â semblables Ă un mĂ©canicien qui force son automate inanimĂ© Ă exĂ©cuter des gestes humains â balançaient doucement leur tĂȘte enivrĂ©e, dansonnaient avec la foule joyeuse sans mĂȘme regarder le jeune couple. Puis le bruit, les rires, les chants se firent de plus en plus bas. Lâarchet se mourait affaibli et perdant ses sons indistincts dans le vide de lâatmosphĂšre. On entendit encore au loin un piĂ©tinement, quelque chose comme le murmure dâune mer lointaine. Tout enfin redevint dĂ©sert et muet. Ainsi la joie, belle et inconsciente hĂŽtesse, sâenvole de chez nous, et câest en vain quâune voix isolĂ©e pense exprimer la gaietĂ©. Dans son propre Ă©cho, elle entend dĂ©jĂ la tristesse et la solitude, et elle Ă©coute stupĂ©faite. Ainsi les espiĂšgles amis dâune jeunesse agitĂ©e et libre se perdent un Ă un et laissent finalement seul leur ancien frĂšre. Lâennui sâĂ©tend sur lâabandonnĂ©, son cĆur se serre et rien ne peut le consoler. â Charretiers. â Nom dâune riviĂšre. â Cafetan, svitka en langue ukranienne. â LittĂ©ralement sĂ©culaire. â Les femmes. â Sorte de gelĂ©e de fruits. â Lutin domestique. â Boulettes de pĂąte cuite de forme oblongue. â Pour avoir la vĂ©ritable prononciation ukrannienne de ce mot, il faudrait aspirer fortement lâh. â Fils du pope. â PĂątes de fromage cuites dans lâeau. â Diminutif de gaiouchki, sorte de gros macaroni plein et coupĂ© trĂšs court. â Diminutif de pampouchki, autre pĂąte moins frite. â Diminutif de tovtchenik, boulette frite de farine de pois. â Pains en forme de couronnes. â Izba ou khata â chaumiĂšre. â LittĂ©ralement le PeĂŻssi, mĂšche de cheveux que le juif polonais porte le long de lâoreille. â Fourrure en peau de mouton. â Lampion usitĂ© dans la Petite Russie et composĂ© dâun morceau de poterie garnie de graisse de mouton Ă lâintĂ©rieur. Note de lâauteur. â Diminutif de Paraska. â Que portent les femmes mariĂ©es.
Autrefoisun paysan ou un ouvrier aurait mangĂ© pour le dĂ©jeuner de la soupe avec un demi-kilo ou mĂȘme un kilo de pain noir (de seigle). Il y a toutes sortes de pains en Russie mais on peut en distinguer deux groupes principales: âpain blancâ (Ă base de farine de blĂ©) et âpain noirâ (Ă base de farine de seigle). Le pain noir - c
par FrĂšre OursLe corps du Christ⊠"Donnez-nous aujourd'hui notre pain quotidien." Le pain⊠L'odeur du pain chaud fraĂźchement coupĂ©. Sur lequel nous dĂ©posons une noix de beurre qui fondera gentiment, pour le plus grand plaisir de nos papilles gustatives. Il est devenu chose courante dans nos habitudes alimentaires. PrĂ©sence familiĂšre, il agrĂ©mente une grande part de nos repas et collations. Nous cassons la croĂ»te sans nous attarder sur son origine et tout l'impact que cet aliment a pu avoir sur l'Ă©volution de notre humanitĂ©. Eh bien, laissez-moi vous dire, que j'ai moi-mĂȘme Ă©tĂ© vraiment surpris par la somme des informations que j'ai recueillies lors de ma recherche, afin de vous informer, Ă mon tour, sur l'histoire fascinante de la boulangerie Ă travers les Ăąges. J'ai du pain sur la planche. Mmmm! Bien qu'il serait peut-ĂȘtre pratique de ne pouvoir vivre que d'air pur et d'eau fraĂźche, nous devons, pour demeurer vivant et en santĂ©, nous nourrir des fruits de notre mĂšre la Terre. La faim fut, d'ailleurs, l'ennemie par excellence des hommes et des femmes, aux quatre coins du monde, tout au long de notre pĂ©rilleuse ascension vers l'Ăšre moderne. D'abord chasseuse-cueilleuse, l'humanitĂ© dĂ©couvrit les cĂ©rĂ©ales... il y a plus de 10 000 ans. Ce qui redĂ©finit considĂ©rablement notre rapport avec l'alimentation. Le millet serait la premiĂšre cĂ©rĂ©ale consommĂ©e, puis l'orge, l'avoine, le seigle et le blĂ©. On consommait alors les cĂ©rĂ©ales crues, bouillies ou grillĂ©es sur le feu. Plus tard, on apprit Ă moudre les cĂ©rĂ©ales et Ă les transformer en pĂątes, pour en faire des galettes et des crĂȘpes. Riches en protĂ©ines et en glucides, les cĂ©rĂ©ales ont su appaiser la faim de nos ancĂȘtres de l'AntiquitĂ©. Le Nil, berceau de la boulangerie Ce n'est qu'au 3Ăšme siĂšcle avant J-C, que nous voyons l'apparition des premiers pains levĂ©s de l'histoire. Et nous le devons aux Ăgyptiens. Les premiĂšres reprĂ©sentations du pain, se retrouvent dans plusieurs tombeaux Ă©gyptiens, sous forme de fresques. De plus, on a retrouvĂ© des pains dans certaines tombes, parfois pour servir de nourriture au dĂ©funt, pour le long voyage, ou pour offrir en offrande aux Dieux. Les Ăgyptiens broyaient l'orge et le blĂ© entre deux pierres, ils tamisaient ensuite la farine obtenue, et pĂ©trissaient la pĂąte dans de grandes jarres de terre cuite. Et finalement, ils cuisaient les pains dans des moules prĂ©-chauffĂ©s, Ă©galement de terre-cuite, ou de pierre. Pourquoi l'Ăgypte, vous demandez-vous? Eh bien, le pain aurait levĂ© dans la vallĂ©e du Nil en premier, par un pur hasard de circonstance. L'eau du Nil, utilisĂ©e par les premiers boulangers, Ă©tait trĂšs riche en limons, qui fertilisent la terre. Elle regorgeait de ferment saccharomyces, ces champignons-mĂȘmes, qui constituent la levure actuelle. Il suffisait que la pĂąte repose quelques heures, pour qu'elle lĂšve! DĂšs lors, le destin des humains-aines fut intimement liĂ© avec le pain. Tant dans sa vie spirituelle, que matĂ©rielle. Les hĂ©breux, anciennement des tribus nomades, ont sĂ»rement hĂ©ritĂ© de l'art de faire du pain de leurs dominateurs, les Ă©gyptiens. Ils ont par la suite perfectionnĂ© le levain et incorporĂ© le pain dans leur vie religieuse. La genĂšse, de l'ancien testament, parle Ă de nombreuses reprises, du pain au levain et du pain sans levain. Ce dernier, appelĂ© Azim », Ă©tait rĂ©servĂ© pour tous les rituels sacrĂ©s de leur religion. C'est toujours avec le pain Azim que le peuple de MoĂŻse doit cĂ©lĂ©brer la PĂąques, en souvenir de la sortie d'Ăgypte. Le culte et le pain Le caractĂšre sacrĂ© et spirituel du pain prit une plus grande envergure avec le christianisme, et surtout par la venue de JĂ©sus. Curieusement, BethlĂ©em, en AramĂ©en le langage du temps signifie la Maison du pain. Ă cette Ă©poque, la JudĂ©e et la GalilĂ©e subissaient la famine. C'est peut-ĂȘtre cette faim, qui tourmentait la population, qui dicta les paroles de JĂ©sus, des paraboles souvent reliĂ©es Ă la nourriture; le blĂ©, les semailles, les labours et les brebis, etc. Il voulait nourrir le peuple avec le pain de la vie Ă©ternelle, la nourriture spirituelle. Cette analogie du pain au sacrĂ© se concrĂ©tisa d'avantage avec la derniĂšre cĂšne, oĂč JĂ©sus partagea le pain en disant ces paroles cĂ©lĂšbres; "Prenez et mangez-en tous, car ceci est mon corps livrĂ© pour vousâŠ" La boulangerie GrĂ©co-Romaine C'est en GrĂšce que le mĂ©tier de boulanger prend son essor. Les boulangers grecs ont perfectionnĂ© la technique de cuisson en crĂ©ant des fours, constituĂ©s de trous dans les cendres d'un feu, recouvert de braises. Cette mĂȘme technique Ă©tait courante chez les amĂ©rindiens. Les fournils des boulangers grecs avaient souvent recours aux esclaves pour pĂ©trir le pain, travail long et ardu. Ces derniers, mal-nourris, n'avaient souvent pas la chance de gĂŽuter le fruit de leur labeur. On consommait quotidiennement, en GrĂšce, une galette d'orge non-fermentĂ©e, cuite sur pierre; la Maza. Tandis que, les jours de fĂȘte, on mangeait un pain de blĂ©, aromatisĂ© d'huile d'olives, appelĂ© Artos. Au IIe siĂšcle avant J-C, on affirme qu'AthĂšne possĂšde 72 variĂ©tĂ©s de pains et de gĂąteaux. CĂ©rĂ©ale le mot, vient de CĂ©rĂšs, la dĂ©esse des grands pains et de la moisson. Le culte de CĂ©rĂšs Ă©tait la religion officielle de la capitale grecque. HomĂšre appelait les hommes mangeurs de farine ». L'art Pistorica l'art de la boulangerie fut perfectionnĂ© d'avantage par les romains. La mouture Ă©tait faite entre deux grosses pierres coniques, primitivement actionnĂ©es par des esclaves, puis par un cheval. Le pĂ©trissage, dans une cuve cylindrique, Ă l'aide d'un bras mĂ©canique, mu par un cheval. Et la cuisson du pain dans des fours maçonnĂ©s d'argile, ressemblant Ă nos fours Ă bois actuels. Ă PompeĂŻ, la cĂ©lĂšbre ville ensevelie sous les cendres du VĂ©suve, le 24 aoĂ»t 79, on retrouva des fours, des moulins Ă farine, et de nombreux pains calcinĂ©s, mais ayant gardĂ© leur belle exode vers la ville de Rome, d'une dixaine de milliers de paysansannes, donne naissance Ă une grande famine urbaine. On dut rĂ©soudre ce problĂšme en distribuant de la farine gratuitement aux pauvres. Cette distribution Ă©tait faite par des boulangers, devenus fonctionnaires d'Ă©tat. La cĂ©lĂšbre expression "du pain et des jeux" est issue de ces Ă©vĂ©nements. En 59 avant J-C, Ă l'Ă©poque de Jules CĂ©sar, Rome comptait 200 000 bĂ©nĂ©ficiaires de farine gratuite un peu l'ancĂȘtre de l'assistance sociale. Si bien que trois ciĂšcles plus tard, on inventa la transmission hĂ©rĂ©ditaire de la Tesssa, un jeton de contrĂŽle, qu'on prĂ©sentait pour recevoir ses pains gratuits. L'assistance des dĂ©munis Ă©tait devenue une habitude. Le Moyen-Ăge, l'Ăąge des seigneurs Plusieurs centaines d'annĂ©es passent avant que l'on puisse jouir d'amĂ©liorations dans le travail du pain. Mais Ă l'Ă©poque mĂ©diĂ©vale, le pain sera fait avec plus d'aisance. Le collier d'attelage permet au cheval de tirer une plus lourde charge sans s'Ă©trangler, la charrue Ă roues et le flĂ©au Ă battre le grain, et surtout le moulin Ă vent, qui apparut en Angleterre, au dĂ©but du IXe siĂšcle, permettent la transformation efficace des cĂ©rĂ©ales en farine. La France doit attendre encore 3 siĂšcles avant d'avoir son moulin Ă vent. Le systĂšme fĂ©odal imposa ses lois et ses privilĂšges. Les seigneurs possĂ©daient les fours Ă pain ainsi que les moulins. Ces services devaient ĂȘtre payĂ©s par des redevances des paysans, qui avaient, en plus, la tĂąche de transporter leurs grains au moulin, retourner faire le pain chez eux, et finalement aller faire cuire leurs pains aux fours seigneuriaux. Le pain de paysan Ă©tait une grosse miche d'au moins 10 livres, mais jamais de pur froment le blĂ©, en France incluait toutes les cĂ©rĂ©ales. La famine et la disette apportaient le pain de famine. C'est-Ă - dire, un peu de farine de blĂ© mĂȘlĂ©e Ă de la paille, de l'argile, ou d'Ă©corce d'arbre moulue, de farine de glands et d'herbes pillĂ©es, etcâŠLes riches bourgeois, les seigneurs et les rois, eux, connaissaient, bien sĂ»r, une bien meilleure table. On a dĂ©nombrĂ© plusieurs sortes de pains particuliers aux classes biens nanties; le pain de cour, le pain des pairs, le pain de pape, le pain de chevalier, et le pain de valet. Ce n'est qu'au XIIe siĂšcle que les talemeliers ancien nom donnĂ© aux boulangers - boulanger entrera en vigueur au XVe siĂšcle - et vient de la boule de pĂąte qui devient le pain reçoivent le droit de possĂ©der leur propre four. Le mĂ©tier sera alors rĂšglementĂ© par l'autoritĂ© royale. DĂšs le XIIIe siĂšcle, les talemeliers de Paris et de ses alentours offraient plus d'une trentaine de variĂ©tĂ©s de pain. Naissance du compagnonnage chez les maĂźtres talemeliers au XIVe siĂšcle. On voit apparaĂźtre plusieurs ouvrages sur la boulangerie, tĂ©moignant du progrĂšs de cet art, dont "Le parfait boulanger" publiĂ© en 1778, par l'agronome Antoine Augustin Parmentier. Eh oui, celui-lĂ mĂȘme qui rendit cĂ©lĂšbre la pomme de terre et le hachis parmentier l'ancĂȘtre du pĂątĂ© chinois. En 1780, il ouvre l'acadĂ©mie de boulangerie, Ă Paris. DestinĂ©e Ă Ă©tudier de nouvelles combinaisons farineuses pouvant servir au pain, en temps de famine. En fait, il voulait populariser la farine de patate, puis l'avoine, le sarrasin et le maĂŻs.. Mais personne ne voulait en manger. Dans son manuel du parfait boulanger, Parmentier dĂ©crit toutes les Ă©tapes de fabrication du pain de l'Ă©poque et ajoute un ingrĂ©dient; le sel, qui ajoutĂ© Ă la pĂąte la rend plus tenace, donnant un pain mieux dĂ©veloppĂ©. La levure Ă biĂšre fait Ă©galement son apparition dans le processus de levaison du pain. Voici maintenant un petit fait historique assez intĂ©ressant. En 1689, Ă Vienne, les boulangers, de par leur habitude de se lever tĂŽt pour accomplir leur travail, auraient sauvĂ© la ville d'une attaque des Ottomans, simplement en s'apercevant de leur prĂ©sence dans le silence de l'aube. Le Roi leur aurait donnĂ© le droit de crĂ©er des petits pains en forme de croissant de lune, qui Ă©tait le symbole de leurs ennemis vaincus. Et c'est depuis ce temps, vrai comme chus lĂ , que nous dĂ©gustons les croissants, souvant accompagnĂ©s de cafĂ© turc, quelle ironie! Le complot de la faim L'histoire du pain eut un trĂšs grand rĂŽle Ă jouer dans l'une des mĂ©saventures les plus cĂ©lĂšbres de France; La rĂ©volution française. C'est en partie une grande famine qui incita le peuple Ă se rĂ©volter. Une trĂšs mauvaise moisson en 1788, doublĂ©e d'une hausse des prix des cĂ©rĂ©ales, ont donnĂ© un coup dur aux pauvres. Ce n'est pas le manque de pain le problĂšme, c'est son prix trop Ă©levĂ© qui engendra la famine et la rĂ©volte. Les seigneurs stockaient le grain pour le revendre Ă profit. Et les meuniers et les boulangers spĂ©culaient sur les grains. Finalement, en juillet 1789, les rebelles de la rĂ©volution s'emparent de la Bastille, croyant y trouver une grande rĂ©serve de blĂ©. AprĂšs la rĂ©volution, au nom de l'Ă©galitĂ©, le blĂ© supplanta toutes les autres cĂ©rĂ©ales. Et le pain de froment, jadis pain des riches, devint le pain de tout le monde. La boulangerie en Nouvelle-France Le pain constitue la base de l'alimentation familiale des premiers paysans de Nouvelle-France. Le traditionnel pain d'habitants, Ă©tait une grosse miche de froment d'au moins 10 livres. Il y avait aussi le pain de chantier, qui ressemblait plus Ă la banik amĂ©rindienne, et le pain de canotier, qui Ă©tait cuit sur des pierres chauffĂ©es. Quand il y avait des mauvaises rĂ©coltes, on incorporait dans le pain de la farine de pois, qui est trĂšs indigeste. Les familles conservaient la farine dans un grand baril en bois, muni d'un tamis pouvant contenir 200 livres de farine. Comme le seigle poussait trĂšs bien au Canada, les habitants mĂ©langeaint souvent de la farine de seigle Ă la farine de blĂ©. Le pain levait au QuĂ©bec, plus souvent qu'autrement, avec un levain maison fait avec du houblon et des patates. La recette est simple et va comme suit on prend deux bonnes poignĂ©es de fleurs et de feuilles de houblon, cueillies Ă l'automne. On infuse le tout en rajoutant deux grosses patates rĂąpĂ©es et bouillies. En terminant, on ajoute de la farine au mĂ©lange, et l'affaire est ketchup! La pĂąte est pĂ©trie dans un meuble fait spĂ©cialement pour cette tĂąche, un espĂšce de gros coffre en bois, appelĂ© pĂ©trin, oĂč on laisse toujours de la farine. D'oĂč l'expression "ĂȘtre dans le pĂ©trin", se rapportant aux difficultĂ©s du pĂ©trissage. La huche Ă pain est un autre meuble traditionnel de l'art de la boulangerie quĂ©bĂ©coise. Elle sert Ă former les pains, une fois pĂ©tris, et pour conserver les pains lorsqu'ils sont cuits. Les boulangĂšres, mĂšres de famille, enfournaient gĂ©nĂ©ralement une fois par semaine, cuisinant environ une vingtaine de pains Ă la fois. Le four Ă pain au QuĂ©bec devient rapidement un grand symbole national, et une caractĂ©ristique de dĂ©pendance des habitations canadiennes-françaises. Il sera le centre de nombreuses coutumes et traditions. On ira mĂȘme le parader sur un char allĂ©gorique, lors du dĂ©filĂ© de la Saint-Jean. Parfois extĂ©rieur, parfois intĂ©rieur, le four Ă pain est toujours prĂšs de la famille quĂ©bĂ©coise. Il existait cependant des fours communautaires. Pour citer un exemple, Ă Saint-PacĂŽme de Kamouraska, vers 1935, le four de Joseph-Pierre Courcy Ă©tait utilisĂ© par 12 familles, et chauffait 6 jours sur 7. Les fours Ă pains quĂ©bĂ©cois Ă©taient gĂ©nĂ©ralement faits de glaise, qui conserve mieux la chaleur. Les bĂątisseurs de fours Ă©taient connus Ă la ronde. On se rappelle souvent d'Alexis le Trotteur, personnage quasi-mythique du Saguenay-lac-St-Jean, comme un expert constructeur de fours. La mĂ©thode Ă©tait sensiblement la mĂȘme partout au QuĂ©bec. On Ă©levait une plateforme en pierres, sur laquelle on installait l'HĂątre, la partie plate et lisse du four, qui accueillait les pains. Ensuite, on Ă©rigeait une structure en branches souples d'aulnes et de noisetiers. Ce treillis accueillait le torchis de glaise et paille. Il ne faut pas oublier les portes du four, qui Ă©taient probablement faites par un forgeron. Le tout Ă©tait recouvert d'un petit abris, protĂ©geant des intempĂ©ries. Quand le four Ă©tait terminĂ©, on le baptisait, en "mouillant le four", ce qui voulait dire l'arroser avec de l'alcool, ou de l'eau bĂ©nite. De plus, on y installait souvent un petit canard en argile, pour inciter le pain Ă s'envoler pour qu'il lĂšve bien et qu'il soit lĂ©ger. Un autre rituel concernant le four Ă pain mĂ©rite attention. "Battre la vieille annĂ©e" Ă©tait une fĂȘte du 31 dĂ©cembre. On dansait toute la soirĂ©e, et au 12Ăšme coup de minuit, on battait lĂ©gĂšrement le four rituel de mort du four Ă pain. On sortait ainsi, symboliquement, les mauvais esprits qui auraient pu s'attacher Ă ses parois pendant l'annĂ©e. MĂȘme le langage quĂ©bĂ©cois sera influencĂ© par le four Ă pain. Les anciens ont créé un parlĂ© imagĂ© pour exprimer leurs dĂ©sirs grivois. Par exemple, pour savoir si sa femme daignerait lui accorder ses faveurs amoureuses, mĂȘme devant les enfants, l'homme lui demandait "C'est t'y Ă soir qu'on chauffe le four?» Et si la femme n'Ă©tait pas en forme, ou pas disposĂ©e Ă l'acte, elle rĂ©pondait "Le bois est humide!" ou bien, "y a pas de bois fendu!". Ces codes pour adultes se retrouvent aussi dans les chansons. Comme dans la trĂšs connue "Fendez le bois, chauffez le four". Enfin, le voile se lĂšve sur ce mystĂšre folklorique! Comme le peuple QuĂ©bĂ©cois est trĂšs croyant, le rituel sacrĂ© et spirituel en relation avec le pain, sera Ă©galement trĂšs prĂ©sent. On trace couramment une croix sur les pains avant de les enfourner. Gaspiller le pain Ă©tait une mauvaise chose. On utilisait mĂȘme le pain brĂ»lĂ© de plusieurs façons pour ne pas le perdre... En poudre, comme cafĂ© de cĂ©rĂ©ale, pour faire du vin de pain brĂ»lĂ© et on y attribuait mĂȘme des propriĂ©tĂ©s mĂ©dicinales. Par exemple, une infusion de pain brĂ»lĂ© provoquerait l'accouchement. Dans les contes et lĂ©gendes, le Diable vient souvent saboter les fours Ă pains des bons chrĂ©tiens, et si on a le malheur de refuser la charitĂ© Ă un quĂȘteux, celui-ci pouvait vous lancer un mauvais sort, vous empĂȘchant de faire du bon pain. Le seul contre-sort, Ă©tait de piquer un mauvais pain avec des aiguilles et de le brĂ»ler. Il y aurait sans doute encore des centaines d'anectotes rapport au pain, mais cela vous donne un bon aperçu de l'importance folklorique de la boulangerie, au QuĂ©bec d'antan. Le pain moderne Avec la modernitĂ© et la science, faire le pain n'est plus la mĂȘme aventure. Avec les moteurs Ă©lectriques, les fours Ă gaz et au mazout, et les cylindres de mĂ©tal qui donnent une mouture ultra fine, c'est de plus en plus facile de faire du pain, mais beaucoup moins humain. Au Canada, grĂące aux expĂ©riences du moine-botaniste Gregor Mendel, fondateur de la gĂ©nĂ©tique1860, on peut bĂ©nĂ©ficier d'un hybride de blĂ©, plus tolĂ©rant des conditions difficiles de notre climat. Le blĂ© Marquis est trĂšs productif, et assure au Canada, une bonne place dans le marchĂ© de la farine. Le pain n'a pas fini de jouer un rĂŽle crucial dans notre histoire. En Europe, pendant la premiĂšre guerre mondiale, les europĂ©ens purent continuer Ă manger du pain en exportant massivement du blĂ© amĂ©ricain, et l'entrĂ©e en guerre des Ătat-Unis, prĂ©cipita l'effondrement moral et physique de l'Allemagne et de l'Autriche, en les privant de blĂ©. Les Français, avec une technique de sur-oxydation de la farine, la blanchissant, la rendant ainsi ultra-lĂ©gĂšre, crĂ©ent le pain blanc, moins nutritif et plus pĂ©rissable, au dĂ©sarroi de plusieurs amateurs de pain intĂ©gral. Ă ce sujet, plusieurs sonnent l'alarme. En 1916, on publie au Canada "La grande erreur du pain blanc", qui dĂ©nonce les consĂ©quences fĂącheuses de l'abandon du pain naturel. De toutes maniĂšres, qu'il soit blanc, brun , noir avec ou sans noix, je vous souhaite un bon appĂ©tit! RĂ©fĂ©rences - Le livre du pain, JĂ©rĂŽme Assire, Ădition Flammarion, - Le Pain d'habitant "tradition du geste et de la parole", Claude Dupont, Ăditions LemĂ©ac - Les fours Ă pain au QuĂ©bec, Lise Boily et Jean-François Blanchette, Ăditions MusĂ©e National de l'Homme - Le pain les pĂątisseries et les outils d'autrefois, RenĂ© Brochut et Jean-Pierre HĂ©ry, Ăditions Marcel Broquet, collection MĂ©tiers d'hier
vGSUAz. 47 403 418 323 416 485 439 317 382